Dernière modification effectuée le 7 octobre 2023
Après le démembrement d’un bien immobilier, le nu-propriétaire et l’usufruitier ont chacun leurs droits et leurs obligations sur la propriété. Le nu-propriétaire en tant que futur acquéreur de la pleine propriété est limité dans ses possibilités immédiates. Lorsque le bien est en démembrement dans le cadre d’une succession ou d’une donation, les limites ne contraignent que peu.
C’est souvent lors d’un achat que les questions d’habitation, d’entretien, et de vente peuvent poser problème. Il convient de connaître au préalable les droits en nue-propriété pour éviter les éventuels conflits et mieux intégrer le concept que l’on a décidé d’acheter un bien immobilier en démembrement, ou que l’on soit héritier.
Qu’est ce que la nue-propriété ?
Quand une possession est démembrée, l’acte de propriété le divise en deux parts distinctes : la nue-propriété et l’usufruit. La nue-propriété est le droit de disposer des murs sans pouvoir jouir ni du logement, ni d’une exploitation locative. L’usufruit offre la possibilité d’habiter et/ou de louer le bâtiment entièrement ou partiellement. Le code général des impôts propose des tableaux de répartitions de valeurs entre usufruitier et nu-propriétaire.
La nue-propriété concerne aussi toute possession dont on ne peut disposer l’usufruit. Il peut s’agir d’une voiture, d’un instrument, d’actions sociales, ou encore d’un mobilier. Tout ce dont on peut posséder sans pouvoir en tirer des bénéfices financiers et sans pouvoir exercer une occupation peut faire l’objet d’une nue-propriété. En revanche, la nue-propriété a pour vocation d’un remembrement en pleine propriété.
De nombreux articles définissent l’usufruit dans le Code civil ; la notion de la nue-propriété est de ce fait comprise via la compréhension de l’usufruit. Le Code civil traite plus amplement de l’usufruit en raison des droits limités du nu-propriétaire et du fait de ses réglementations logiquement compréhensibles.
En effet, même si le Code civil ne traite la nue-propriété qu’en infime partie, voici ce que l’on peut comprendre de la notion : le nu-propriétaire possède le bien mais ne peut ni y habiter, ni en percer des loyers. En revanche, au décès de l’usufruitier, le bien est remembré et il en aura la pleine jouissance.
Les droits du nu-propriétaire
Le nu-propriétaire a le droit de disposer du bien sans y avoir le droit de jouissance dans le cadre d’un investissement immobilier immédiat. Il a le droit de transformer le bâtiment parce qu’il dispose des murs, mais il n’a pas le droit d’en percer des revenus locatifs ni d’y habiter.
L’immeuble lui appartient techniquement et il a le droit d’exiger une bonne gestion de l’investissement à l’usufruitier, mais ne peut pas contraindre ce dernier à percer ses avantages. Le nu-propriétaire peut exiger de l’usufruitier les devoirs de réparations et d’entretiens divers si ce dernier néglige ses devoirs en qualité d’usufruitier.
Dans son droit d’abusus dit que le nu-propriétaire peut disposer de son bien comme il le désire. En revanche, il ne peut concrètement agir sans respecter les droits de l’usufruitier. Il est dans l’obligation de respecter l’usufruitier dans son activité et de ne pas le contraindre dans ses avantages.
Même s’il a le droit d’entreprendre des chantiers pour agrandir ou moduler le bâtiment par exemple, il ne peut le faire sans avoir discuté au préalable avec l’usufruitier. De son côté, ce dernier peut refuser l’entreprise des travaux si le chantier venait à nuire totalement à son projet d’investissement. Il est ensuite stipulé que le nu-propriétaire peut détruire la maison comme il en dispose.
La mention de ce droit ne permet pas au nu-propriétaire d’en abuser dans le cadre d’un usufruit en total respect des devoirs qu’incombe l’usufruitier. Ce droit de détruire est notamment mentionné pour rappeler que le nu-propriétaire est le seul à qui reviendra la totalité de la possession démembrée lors du remembrement.
La mention de destruction insinue en quelque sorte que la nue-propriété est similaire à la pleine propriété. En revanche, le nu-propriétaire ne peut agir à l’encontre des droits de l’usufruitier, sauf carence de ce dernier.
Les devoirs du nu-propriétaire
Les devoirs du nu-propriétaire sont à la hauteur de ses droits. Pour mieux cerner les obligations du propriétaire des murs, je vais déjà mentionner quelques-une des obligations de l’usufruitier. Mon but est de vous donner des balises qui vous permettent de connaître les devoirs d’un nu-propriétaire en opposition à ceux de l’usufruitier.
Déjà, le nu-propriétaire ne paie pas d’impôts sur les revenus. C’est à l’usufruitier de s’en acquitter s’il investit l’immobilier en location, quel que soit le montant annuel des loyers qu’il perçoit. Il revient aussi à l’usufruitier de payer la taxe d’habitation s’il réside à l’adresse du bâtiment.
Si le nu-propriétaire occupe le bien en revanche, il lui incombe de payer la taxe d’habitation. Cette occurrence est possible si l’usufruitier ne compte pas investir le bien et propose aux nus-propriétaires de l’occuper. Ce cas est courant dans un cadre de démembrement de patrimoine familial.
En effet, lorsque les nus-propriétaires ne sont pas encore en âge d’habiter sans leurs parents, cette disposition est prise. L’accord peut aussi se prolonger à vie lorsque le démembrement relève d’un procédé d’allègement fiscal uniquement. Il convient de noter ce type d’accord à l’écrit en présence du notaire pour éviter les futurs litiges.
En ce qui concerne les taxes foncières, le nu-propriétaire est imposable si l’usufruitier ne s’en acquitte pas. Un accord tacite entre les deux parties est nécessaire pour déterminer ce qu’il en est. Pour l’Impôt sur la Fortune Immobilière ou l’IFI, le nu-propriétaire et l’usufruitier en sont imposables, c’est la même chose pour les plus-values immobilières. Ensuite, le droit de succession en nue-propriété relève aussi du devoir des nus-propriétaires.
Pour les obligations physiques et juridiques, les nus-propriétaires doivent :
- Effectuer les gros travaux destinés à conserver l’intégrité du bien (réparation des structures de la maison)
- Payer les taxes cycliques et exceptionnels
- Laisser la gestion totale de la location et les avantages de l’investissement à l’usufruitier
Les recours du nu-propriétaire en cas de litiges avec l’usufruitier
Le premier point de litige entre les propriétaires démembrés concerne le manquement aux devoirs sur le bien. Les usufruitiers doivent procéder aux réparations courantes et aux entretiens sachant qu’ils profitent du bail et/ou de l’usage du bien en tant que logement. Le contrat doit mentionner qu’il incombe aux usufruitiers de débourser pour les entretiens de l’immeuble qu’ils investissent.
D’un point de vue logique, on ne peut simplement percevoir les fruits d’un investissement sans en assurer sa part dans la conservation du bien investit. La loi exige également aux usufruitiers d’assurer leur part fiscale au prix de ce qu’ils reçoivent en tant qu’exploitants du bien démembré.
S’ils ne s’acquittent pas de cette part fiscale comme le dicte la loi, les nus-propriétaires peuvent saisir la justice pour régulariser le cas. Dans ce type d’affaires, les nus-propriétaires peuvent retirer leur titre aux usufruitiers et réclamer l’entière propriété du bien. Comme lors d’un manquement aux devoirs dans les réparations et les entretiens, les usufruitiers doivent également dédommager les nus-propriétaires à titre financier.
Pendant la durée de l’usufruit, le nu-propriétaire peut recourir à la justice si l’usufruitier utilise son bail pour des buts commerciaux. En effet, les baux ruraux, commerciaux, industriels et artisanaux doivent faire l’objet d’une discussion au préalable avec le nu-propriétaire.
Si l’usufruitier agit seul et sans l’accord du nu-propriétaire, ce dernier a le droit de poursuivre en justice l’usufruitier. Il appartient à l’usufruitier d’exposer l’éventualité de ces types de baux au nu-propriétaire pour expliciter en amont et en aval les portées du projet, ses conséquences et ses avantages sur le court comme le long terme.
Les nus-propriétaires ont le droit de saisir la justice si les usufruitiers agissent dans le cadre des actions relatives à la propriété du bien. C’est le cas de l’acceptation d’un droit de servitude ou d’une action en revendication par exemple. Le juge intentera d’une manière ou d’une autre à un accord à l’amiable avant de prendre ses dispositions quel que soit le cas à traiter.
Quand la nue-propriété prend-elle fin ?
La fin de la nue-propriété signifie simplement un remembrement du bien. Il s’agit plus concrètement de la fin de l’usufruit. La période du remembrement est déterminée au préalable dans le contrat de la possession démembrée. S’il s’agit d’un contrat à vie, les usufruitiers exercent leur pouvoir d’exploitation ou d’occupation de leur vivant. Leur décès marque alors la fin de l’accord.
Au décès de l’un des conjoints (souvent les parents des nus-propriétaires), le conjoint survivant hérite de l’usufruit. C’est alors à la disparition du dernier conjoint que l’accord prend réellement fin, et que le remembrement restitue la pleine propriété aux nus-propriétaires.
Si les usufruitiers détiennent un titre temporaire, le remembrement du bien en faveur des nus-propriétaires se fait à la fin de la période d’exploitation mentionnée dans les premiers accords. Cette période peut prendre 10 ans à 30 ans. Il arrive que le remembrement devienne obligatoire quand les usufruitiers manquent à leurs devoirs tant fiscaux que physiques.
S’ils ne prennent pas les dispositions nécessaires pour conserver le bien et pour payer les taxes, les nus-propriétaires ont la possibilité d’exiger le retrait de leur titre. A ce moment, il y a remembrement si le juge constate de vrais litiges et décide de trancher en faveur des nus-propriétaires.
Lorsque l’usufruit d’un bien n’est pas exploité sur une période de 30 ans, le remembrement est enclenché automatiquement. A ce stade, il n’y a plus statut d’abusus, d’usus et de fructus. L’entièreté du bien revient aux nus-propriétaires.
Un remembrement est également possible si les usufruitiers renoncent à leur titre, si les nus-propriétaires et les usufruitiers décident d’un commun accord de réunir la propriété ou si les deux parties préfèrent vendre le bien en qualité de propriété pleine.
En conclusion, les droits des nus-propriétaires sont restreints et se reconnaissent notamment en opposition à ceux des usufruitiers.